Sociétés minières, affiliation et investissement en Afrique: Contribution à l’étude critique de la responsabilité limitée des sociétés minière

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  • Au regard de la règle de la responsabilité limitée, les « actionnaires ne supportent le risque qu’à concurrence du montant de leur investissement, qui est déterminé a priori, plutôt qu’a posteriori » c’est-à-dire au montant de leurs apports au capital de la société. Il est ainsi établi un « voile (…) entre le patrimoine personnel des actionnaires et le patrimoine de la société ».

 

C’est en considération de ce voile qu’ en cas de pertes, les actionnaires ne peuvent être inquiétés sur leurs biens propres : si la société ne peut éponger ses dettes, ce sont les créanciers qui la supporteront. Alors que leurs (les actionnaires) biens personnels sont protégés contre les pertes éventuelles, ils demeurent certains de bénéficier des profits en cas de succès.

Or, à titre d’exemple, la détermination du caractère excessif du contrôle d’une société mère sur sa filiale repose moins sur les critères de la qualification du groupe de sociétés. Même la détention de la totalité des parts n’est pas en soi, déterminante.

 

Pour ainsi lever le voile social sur le fondement du caractère excessif du contrôle exercé sur une filiale par la société mère, « il faut démontrer un manque total d’indépendance de facto de la société filiale et une impossibilité pure et simple pour ses directeurs d’administrer leur société et de prendre des décisions dans son intérêt social propre ». Au nombre des indices permettant d’établir la preuve du manque d’indépendance figurent, le fait que :

 

1. la filiale ne tienne pas de comptabilité séparée,

 

2. ne dispose ni d’un siège social propre, ni n’a respecté les formalités relatives aux réunions de son assemblée générale et de son Conseil d’administration.

 

Alors que les facteurs précités sont cumulatifs, il résulte de ce seul exemple déjà qu’une application stricte de ces indices rendrait inéluctablement inefficace toute tentative de levée du voile social sur ces fondements. Car, pour ce qui concerne la démonstration du contrôle excessif, en vertu d’une exigence légale, les sociétés minières menant leurs activités dans nombreux États africains sont tenues d’avoir leur siège social sur le territoire de l’État dont les ressources sont exploitées. De même, elles ne peuvent pas ne pas tenir leurs assemblées générales et conseils d’administration, étant entendu que les États y sont, en raison de leurs participations au capital, représentés par des administrateurs ayant vocation à défendre leurs intérêts.

 

C’est compte tenu de la difficulté de démonstration de ces indices qu’il vaut mieux reposer la proposition de la levée du voile social sur le critère l’affiliation permettant aux sociétés cédantes de s’affranchir de la cession d’actions au bénéfices des cessionnaires (sociétés affiliées).

 

On exigerait que pour la durée de validité initiale du titre minier, les cédants soient solidairement responsables des manquements des cessionnaires non contrôlés en raison de l’affiliation à leurs obligations légales et contractuels. Les cessionnaires seraient ainsi exclusivement responsables de leurs actes qu’à compter d’une éventuelle prorogation de la durée de validité du titre. Un tel mécanisme aurait un double avantage.

 

D’abord, il permettrait d’éviter que l’inopposabilité des mécanismes de contrôle qui résulte de l’affiliation ne conduise les cédants à examiner avec peu de rigueur, le sérieux et les motivations réelles des cessionnaires (sociétés affiliées) auxquelles elles cèdent leurs actions. Ensuite, il apparaîtrait comme un instrument équitable de conciliation du droit des sociétés affiliées à la libre cession de leurs actions et le droit des États de contrôler l’actionnariat desdites sociétés.

Jean Paul Kotembedouno

Docteur en droit public de l’Université Paris 1, Panthéon-Sorbonne.

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